Note publique d'information : En mécanique quantique, toute mesure est responsable d'une action en retour sur le
système mesuré, qui limite en général la sensibilité de la mesure. Il en est ainsi
dans les mesures interférométriques, où les miroirs de l'interféromètre sont susceptibles
de se déplacer sous l'effet de la pression de radiation exercée par la lumière. Ceci
provoque un bruit supplémentaire dans la mesure de longueur des bras de l'interféromètre
et conduit à l'existence d'une limite quantique pour la sensibilité de la mesure.
Ces effets produisent également des corrélations entre l'intensité de la lumière et
le mouvement du miroir, qui pourraient être mises à profit en optique quantique. Nous
avons développé une expérience destinée à l'étude des bruits dans les mesures interférométriques
ultrasensibles, qu'ils soient d'origine classique comme le bruit thermique des miroirs,
ou bien d'origine plus fondamentale, comme le bruit quantique de la pression de radiation,
qui n’a encore jamais été mis en évidence à ce jour. L'expérience est basée sur une
cavité Fabry-Pérot de grande finesse, dans laquelle les déplacements du miroir sont
mesurés à un niveau meilleur que l'attomètre en détectant les variations de phase
du faisceau réfléchi par la cavité. Nous présentons l'ensemble des améliorations que
nous avons apportées à notre système, destinées avant tout à favoriser le bruit quantique
de pression de radiation par rapport au bruit thermique, ainsi que les importants
ajustements de notre dispositif qui ont eux-mêmes découlé de ces améliorations. Pour
pouvoir atteindre cet objectif, nous avons suivi trois stratégies en parallèle: nous
avons tenté de diminuer la force thermique de Langevin en installant un cryostat fonctionnant
à 4 K, nous avons amélioré les propriétés mécaniques de notre résonateur de manière
à ce qu'il réponde plus favorablement à la pression de radiation, et nous avons enfin
augmenté l'amplitude des effets de pression de radiation, en améliorant la finesse
de la cavité. Ces améliorations nous ont permis d’obtenir un fonctionnement cryogénique
mécaniquement stable à une température se situant vraisemblablement autour de la dizaine
de Kelvin, mais elles ont surtout permis l’obtention de facteurs de qualité mécaniques
de l’ordre de 800000, et des masses de l’ordre de quelques dizaines de milligrammes,
de concert avec une finesse record de 330000, ce qui correspond à une amélioration
du rapport entre les effets de pression de radiation et les effets thermiques de plus
de deux ordres de grandeur comparativement à nos précédentes cavités à miroir mobile.Nous
avons présenté une étude détaillée des effets optomécaniques de la pression de radiation,
d'abord théorique, puis expérimentale. La particularité de notre approche est la prise
en compte de la nature multimode de notre résonateur, dont nous avons présenté les
conséquences sur la mise en évidence de l'action en retour, ainsi que sur la sensibilité
de la mesure. Nous avons ensuite présenté l'étude expérimentale de la réponse spectrale
du mode fondamental Gaussien de notre résonateur plan-convexe à une force de pression
de radiation, qui nous a permis de valider notre approche théorique, ainsi que de
préciser les conditions les plus favorables à la mise en évidence des corrélations
optomécaniques quantiques. Nous avons également démontré expérimentalement qu'il était
possible de profiter de la nature multimode de nos miroirs pour améliorer la sensibilité
de la mesure. Enfin, nous avons présenté une étude des corrélations optomécaniques
au niveau classique entre l’intensité d’un faisceau signal et la phase d’un faisceau
de mesure, que nous avons réalisée à l'aide de bruits d'intensité arbitraires, construits
pour être aussi semblables que possible au bruit quantique, bien qu'ayant une puissance
spectrale beaucoup plus grande.Nous avons étudié en détails les conditions expérimentales
limitant l'observation des corrélations quantiques lorsque l'on se trouve en régime
thermique. Nous avons tout d'abord présenté une technique de moyennage permettant
de mettre en évidence les déplacements induits par un bruit de pression de radiation
arbitraire et périodique, dont la densité spectrale faible devant celle du bruit thermique.
Nous avons ensuite expliqué comment il est possible d'étendre cette technique de moyennage
au cas du bruit quantique de pression de radiation, en nous intéressant tout particulièrement
à la durée de moyennage nécessaire pour pouvoir extraire les corrélations avec une
précision suffisante, et nous avons illustré expérimentalement les concepts proposés,
toujours à l'aide d'un bruit de pression de radiation classique. Nous avons ensuite
vu que la durée du moyennage n'était pas la seule limitation expérimentale à l'observation
des corrélations quantiques, mais que l'existence de pertes optiques dans la cavité
peuvent être à l'origine d'une contamination de la quadrature d'intensité du champ
réfléchi par les fluctuations de position du miroir, qui induisent des conditions
très fortes sur la qualité de l'asservissement de la fréquence du laser sur la résonance
optique. Nous avons explicité ces conditions dans le cas de corrélations mesurées
à résonance mécanique et hors résonance mécanique, et nous avons terminé par la mise
en évidence expérimentale de ce phénomène de contamination.Nous avons consacré la
dernière partie de ce manuscrit à une étude du couplage optomécanique dans une cavité
désaccordée. Nous avons tout d'abord présenté une description théorique des effets
de pression de radiation dans une cavité désaccordée, également appelés "action en
retour dynamique", dont nous avons vu qu'ils se décomposaient en deux contributions,
l'une dissipative, et l'autre conservative. Nous avons illustré expérimentalement
des applications de chacune de ces contributions: nous avons d'abord présenté une
démonstration de refroidissement passif de notre résonateur plan-convexe, puis nous
avons montré qu'il était possible d'utiliser la contribution conservative de l'action
en retour dynamique afin d’amplifier une variation de longueur apparente de la cavité,
c'est-à-dire une variation de longueur indépendante de la réponse mécanique du miroir
mobile, comme en génère par exemple une onde gravitationnelle. Nous démontrons également
que cet effet d’amplification peut être associé dans certaines conditions à une amélioration
de la sensibilité de la mesure. Nous avons ainsi démontré expérimentalement une amplification
d’un facteur 6 sur un signal consistant en une modulation de fréquence du laser. Nous
avons également démontré que cette amplification est associée à une amélioration de
la sensibilité de 5 dB par rapport à la limite quantique standard.