Note publique d'information : La lecture croisée de Machiavel et Schmitt ne permet pas seulement de déchiffrer certains
événements passés, elle éclaire encore la compréhension des phénomènes les plus récents.
En effet, la conceptualisation que chacun de ces deux auteurs offre de la notion de
situation exceptionnelle – comprise comme un trouble mettant en péril la préservation
de l’État, et face auquel le droit positif peine à s’appliquer – démontre des points
d’accord autant que de divergence, mais dont précisément la confrontation tend à faire
émerger des lignes de force. Or, d’une part, ces dernières semblent permettre d’envisager
le mouvement révolutionnaire anglo-américain et français des XVIIe et XVIIIe siècles
sous l’angle d’une situation exceptionnelle. D’autre part, et d’une manière plus contemporaine,
elles permettent encore de rendre compte de l’exceptionnalité du phénomène terroriste
affectant actuellement ces mêmes États. L’intérêt d’une telle mise en perspective
est double. D’un côté, la confrontation de la théorie machiavélo-schmittienne aux
événements concrets démontre – malgré un indépassable anachronisme – leur incontestable
influence sur le droit des situations de crise. Mais d’un autre côté, et dans le même
temps, l’observation de la pratique révèle les insuffisances de Machiavel et Schmitt
quant à leur appréhension du phénomène exceptionnel, en particulier à propos des moyens
à mettre en oeuvre pour l’endiguer. Face à ce constat, il sera nécessaire de tenir
compte de la pertinence des présupposés de ces deux auteurs, autant que de les critiquer,
afin de pouvoir finalement s’en émanciper pour proposer des outils juridiques aptes
à régir le phénomène exceptionnel actuel.
Note publique d'information : A cross-reading of the writings of Machiavelli and Schmitt not only allows us to decode
certain past events, it also illuminates our understanding of the most recent challenges
to the security of the state. Indeed, both authors conceptualize states of emergency
– understood as responses to disorders threatening the preservation of the state not
adequately covered by positive law – and their analyses demonstrate points of agreement
as well as divergence. Comparing and contrasting them makes salient their lines of
force. Both authors shed important light on the Anglo- American and French revolutionary
movements of the seventeenth and eighteenth centuries as exceptional situations. Moreover,
they also provide insight into the more recent emergency situations encountered by
these states in confronting the terrorist phenomenon. The interest of such a perspective
is twofold. On the one hand, the confrontation of the Machiavelo-Schmittian theory
with concrete events demonstrates – despite insurmountable anachronism – their undeniable
influence on the operations of law in crisis situations. On the other, from the perspective
of their practical application, the theories of Machiavelli and Schmitt both prove
inadequate in their apprehension of the exceptional phenomenon, notably with regard
to the means that might be deployed to curb the threat. With this in mind, it is imperative
to understand both the relevance of the political thought of these two authors, and
take the measure of the limits of their theories. A proper understanding of the pertinence
and limits of their theories with regard to the present situation should enable us
to devise improved legal tools in response to the current crisis.