Note publique d'information : La recombinaison joue un rôle majeur dans l’évolution des VIH et amplifie leur extraordinaire
diversité génétique. Les VIH de groupe O (VIH-1/O) sont des variants rares, endémiques
au Cameroun, et présentant une grande divergence avec les VIH de groupe (VIH-1/M),
le groupe majeur de VIH. Longtemps pensée impossible, la présence de recombinaison
entre ces deux groupes a été démontrée dans les régions où ils co-circulent, les recombinants
MO décrits, rappelant les formes recombinantes uniques (URFs) du VIH-1/M. A ce jour,
dix URFMO ont été caractérisées au Cameroun et une en France. Le peu de données disponibles
les concernant ne permet actuellement pas d’avoir une bonne connaissance des mécanismes
régissant leur génération, leur transmission et leur émergence chez le patient. Dans
la première partie de ce travail, nous avons étudié les règles gouvernant leur génération
pendant la transcription inverse grâce à une cartographie de la recombinaison sur
la première moitié de la séquence codante du VIH-1. Il ressort que ces règles sont
similaires à celles décrites pour les recombinants intra-groupe M : l’identité de
séquence entre les souches parentales est le paramètre majeur mais n’est clairement
pas suffisante pour prédire l’ensemble des points de recombinaison (ou de cassure).
Les structures secondaires de l’ARN génomique, guidant principalement la recombinaison
au niveau des bordures des gènes, semble être le second paramètre impliqué. Nous avons
également montré que la plupart des points de cassure sont retrouvés au même endroit
quels que soient les couples d’isolats utilisés et confirmé que le gène vpr était
un point chaud de recombinaison, comme cela avait déjà été suggéré in vivo. Grâce
au système de surveillance de la diversité des VIH-1 mis en place par le Centre National
de Référence pour le VIH, nous avons également caractérisé huit nouvelles formes ou
formes putatives en France, suspectées grâce à une double réactivité M+O au sérotypage,
de discordances séro-moléculaires ou entre les différents tests moléculaires, survenant
lors du diagnostic ou du suivi des patients. La synthèse des données camerounaises
et françaises sur les points de cassure montre qu’ils sont retrouvés dans quatre zones,
dont trois décrites comme zones chaudes par la cartographie in cellulo. Troisièmement,
nous avons étudié l’impact sur la fonctionnalité virale du point de cassure situé
dans une zone non prédite par la cartographie, mais retrouvé chez trois URFMO, à la
jonction entre la protéase et la transcriptase inverse. Les résultats indiquent qu’un
profil [GagPR-M/RTIN-O] est très en faveur de l’émergence d’une URF-MO alors que le
profil inverse entraîne des défauts de maturation plus ou moins sévères selon les
isolats utilisés. L’investigation de ce défaut a montré que la capside était une barrière
majeure pour la recombinaison MO, avec une inhibition de la transcription inverse
lors qu’une capside M est remplacée par une capside O, quels que soient les isolats
utilisés. Le profil inverse (CA-M dans un contexte O) donne des phénotypes plus contrastés
au niveau de la transcription inverse ou des étapes ultérieures, suggérant des effets
pléïotropiques. Enfin, un biais observé entre le nombre de points de cassure dans
la région codante et la présence ou non d’un point de cassure dans les LTRs entre
U3 et R nous a conduit à revisiter le processus de transcription inverse et à montrer
que les recombinants générés dans les LTRs par les sauts obligatoires de matrice étaient
produits lors du transfert du brin [+], guidé par la présence d’une séquence palindromique
située dans le PBS. En conclusion, ce travail a permis de caractériser 8 nouvelles
URF-MO, menant à un total de 19 formes distinctes et montrant la plasticité de l’évolution
des VIH par recombinaison entre des souches très divergentes. Il a également permis
de préciser les mécanismes menant à leur génération, de montrer que les règles régissant
la recombinaison intra-groupe pouvaient être étendues à la recombinaison inter-groupe
et que l’émergence des URF-MO reposait sur des réseaux complexes de coévolution, partiellement
dépendants des souches parentales.
Note publique d'information : Recombination plays a major role in HIV evolution and amplifies their extraordinary
HIV diversity. HIV-1 group O (HIV-1/O) are rare variants that are mostly found in
Cameroon, where they are endemic. Due to a high genetic divergence between HIV-1/O
and the major group, HIV-1/M, recombination between them had been first thought impossible.
Nevertheless, in regions where HIV-1/M and HIV-1/O co-circulate, HIV-1/M+O dual infections
have been described, leading in some cases to the emergence of HIV-1/MO recombinants,
reminiscent of HIV-1/M unique recombinant forms (URFs). To date, ten URF-MO have been
characterised in Cameroon and one in France. Due to scarce data, little is known regarding
the mechanisms underlying their generation their transmissibility and how they can
establish a sustainable infection in patients. In the first part of this work, we
investigated the rules governing their generation during reverse transcription through
a singe-cycle recombination assay in the first half of the HIV-1 coding sequence.
We found out that they were similar to those described for HIV-1/M intra-group recombinants:
the sequence identity between the parental strains was the first parameter driving
MO recombination, but was clearly not sufficient to predict the breakpoints positions.
RNA structures, mostly guiding recombination at genes borders, were thought to be
the second parameter involved. We also showed that most of breakpoints were found
at the same location for several M/O crossings, while few of them were isolate-specific.
We also confirmed the vpr gene was a recombination hot spot, as previously suspected
for the forms found in patients. Thanks to a the surveillance of HIV-1 genetic diversity,
led by the French National Reference Centre for HIV, we were also able to characterise
eight news forms or putative forms in France, suspected through serological dual reactivity,
sero-molecular or molecular discrepancies, occurring upon diagnosis or monitoring.
With the data gathered in Cameroon and in France, we were able to compare the breakpoints
found in vivo with the mapping carried out in cellulo, and found out that they mostly
cluster in four regions, three of which are described as hot spots with the single-cycle
assay. Using a functional analysis, we investigated the impact of a breakpoints shared
by three unrelated chimeras and located outside a recombination hot spot, at the protease/RT
border. We found out that a [GagPR-M/RTIN-O] pattern was in favour of URF-MO emergence,
while the specular pattern showed mild to strong defects in virion maturation depending
on isolates. By investigating this non-specular phenotype, we further demonstrated
that capsid is a major barrier to MO inter-group recombination, with a strong impairment
of reverse transcription observed when replacing an M capsid by several different
heterologous O counterparts. The opposite pattern (CA-M in an HIV-1/O isolate) led
to variable phenotypes at the reverse transcription and post-reverse transcription
level, suggesting pleiotropic effects. At last, by a thorough study of recombination
patterns in the LTRs, according to the number of breakpoints found in the HIV coding
sequence, we also revisited the reverse transcription process, and demonstrated that
the recombinants generated in LTRs by the strong stops mostly occur during [+] strand
strong stop transfer, due to a particular structure in the PBS. In conclusion, this
work allowed characterising 8 new URF-MO, leading to a current total of 19 distinct
forms, and showing the plasticity of HIV evolution by recombination between highly
divergent strains. It also provided new insights in the mechanisms of generation of
these forms, showing that the rules defined for intra-group recombination could be
extended to inter-group recombinants and that the emergence of recombinants rely on
complex coevolution networks, probably partially strain-dependent.