Note publique d'information : Cette thèse plaide pour une approche contextualisée de la violence jihadiste à partir
d’une étude des mouvements politico-religieux menant une lutte armée au Cachemire
mais basés au Pakistan. Elle questionne les conditions spécifiques au contexte historique,
politique et social qui expliquent cette forme de radicalisation politique. La démonstration
déploie un large spectre, tant au niveau de la durée que des champs d’étude et des
focales de l’analyse. La première hypothèse, méthodologique, est que seule une démarche
croisant la sociologie historique de l’Etat et la sociologie politique de l’engagement
peut rendre intelligible la complexité du processus. Les mouvements jihadistes sont
alors réinscrits dans le temps long d’une pratique, la « privatisation de la violence
extérieure autorisée », dont cette thèse démontre qu’elle est une propriété structurante
de la trajectoire de l’Etat pakistanais depuis 1947. La seconde hypothèse, développée
à partir d’une analyse du point de vue de l’armée, des milices et des recrues, souligne
la dimension équivoque des relations entre ces acteurs. Ainsi, le rapport entre le
secteur militarisé régulier et le secteur milicien oscille entre convergences idéologiques,
transaction collusive et conflit. Les liens des combattants avec les groupes armés
ne sont pas plus stables. L’absence de transitivité entre les différents temps de
la radicalisation suggère qu’à chaque étape, les idéaux et émotions mobilisés par
les entrepreneurs de violence et ceux qui mobilisent les recrues peuvent entrer en
collision. D’où l’intérêt de croiser approche processuelle de l’engagement et études
sur les émotions dans l’analyses de la radicalisation jihadiste.
Note publique d'information : This thesis makes the case for a contextualized approach to jihadist violence. From
an analysis of politico-religious movements based in Pakistan and engaged in an armed
struggle in the disputed territory of Kashmir, it investigates the conditions – related
to the historical, political and social context – that can explain this particular
form of political radicalization. The argumentation rests on a large analytical spectrum,
in terms of timeframe, disciplinary fields and empirical focus. The first hypothesis,
of a methodological nature, is that the complexity of the process should be apprehended
through an approach mixing the historical sociology of the state and the political
sociology of mobilisation. Jihadist movements are indeed understood as being part
of a long-term “state-authorized privatization of extra-territorial violence”, a practice
that proves to be a structural property of the trajectory of the Pakistani state since
1947. The second hypothesis, based places the focus on the perspective of the army,
the militias, and the recruits so as the highlight the ambivalent nature of the relations
between these different actors. Links between the military and the militias vary from
ideological agreement to “collusive transactions” to conflict. Relations between combatants
and armed groups are not stable either. The lack of transitivity between different
phases of radicalisation (recruitment, training, self-sacrificial violence) suggests
that at each step, the narratives and emotions mobilized by entrepreneurs of violence
can clash with those that actually mobilize recruits. Hence the importance of bridging
the processual approach of militancy with emotions studies.